Développement organique et villes soutenables

Retranscription de la conférence du 19 janvier 2024 à Sciences Po (Paris)
Colloque Organic Cities

Auteur
Affiliation

OFCE

Date de publication

19 janvier 2024

Modifié

20 mars 2024

Hier, la journée était intitulée « Making organic cities ». Aujourd’hui, et c’est aussi pour cela que cet amphithéâtre est particulièrement adapté, le mot d’ordre est « Thinking organic cities ».

Le balancement entre making et thinking est important. L’idée est que les modèles centralisateurs ne sont pas ceux qui permettent de répondre le mieux aux besoins. Mais ce qui émerge, qui part du bas, a besoin de la réflexion, de la production de la connaissance, de son partage pour l’articuler avec les politiques publiques.

1 L’importance de la réflexion dans la conception urbaine

Le débat a été vif hier autour de la question « faut-il une DATAR ? ». Il ne s’agit pas de retourner aux schémas centralisés des années 1960. Mais nous ne pourrons pas nous passer de la réflexion et d’une décision collective sur comment nous voyons évoluer et comment nous voulons faire les villes de demain. Et au-delà des villes de demain, les endroits où nous habitons, où nous travaillons, où nous nous cultivons, où nous nous soignons, où nous élevons nos enfants. Il faut mobiliser les énergies de chacun et s’appuyer dessus. Pour répondre aux attendus, l’équité, la justice, le respect des limites planétaires, nous avons besoin d’une image claire de ce que nous devons faire. C’est la production de la connaissance qui permet :

  • La coordination et la décision collective ;

  • D’informer chacun, des contraintes, des possibles ;

  • De faire vivre la démocratie pour que les décisions collectives soient prises dans le respect de tous.

Quand on voit ce que sont les choses, quand on comprend comment elles se font, on est alors en position de pouvoir prendre des décisions et accepter les décisions collectives.

Dans la production de cette connaissance, l’université joue un rôle important. Mais cette connaissance, doit également être produite au contact des acteurs. La collaboration que j’ai maintenant depuis quelques années avec Villes Vivantes et cet événement en est aujourd’hui l’une des concrétisations. Cette collaboration n’est pas le fait du hasard. Si on n’écoute pas les questions qui se posent, si, quand on n’essaye d’y répondre, on n’est pas ouvert à la critique, on ne peut pas produire la connaissance dont on a besoin.

2 Le balancement entre désespoir et espérance dans la vision urbaine

Un deuxième balancement que je voudrais évoquer, emprunté à Kant, et entre le désespoir et l’espérance. Le désespoir c’est celui de l’intelligence et de la lucidité. Nous sommes confrontés à de multiples crises.

La crise environnementale dessine un futur difficile, dans lequel le pire ne peut pas être écarté. Malgré les avertissements des scientifiques du climat, les actes ont été insuffisants. Le monde que cela implique est un monde dans lequel il va falloir entreprendre des adaptions considérables, en particulier dans les villes.

L’intelligence de la situation nous oblige à être désespérés devant l’ampleur de la tâche et considérant ce que nous avons été capable de faire jusqu’à maintenant. On pourrait opposer au désespoir de l’intelligence l’optimisme de la volonté. Mais l’optimisme de la volonté est une formule trop facile. Le balancement au désespoir est l’impératif de l’espérance. Notre dignité humaine est de continuer à vouloir un monde dans lequel nous aurions résolu ces problèmes.

Parce que si nous nous résignons au désastre, nous ne ferons qu’en accroître la certitude. Être animé par ce balancement, c’est ne pas refuser de voir avec lucidité ce qui est et c’est ne pas baisser les bras même si nous craignons d’être impuissants et inconséquents.

3 Un projet de chaire sur les dynamiques urbaines

Je vais terminer sur une annonce. Depuis maintenant quelques mois, nous travaillons, en particulier avec Ilaria Milazzo et Tommaso Vitale à l’École Urbaine de Sciences Po Paris, à un projet de chaire sur les dynamiques urbaines dans lequel nous allons essayer de mettre en œuvre nos convictions.

Nos convictions sont d’abord de produire une connaissance qui soit en rapport avec les réalités, l’intelligence du désespoir, mais qui soit aussi l’instrument de l’espérance. Une connaissance qui met l’accent sur la quantification : Shlomo Angel, qui va prendre la parole juste après moi, vous parlera de l’importance de la quantification. C’est une conviction que je partage.

Dans cette chaire des dynamiques urbaines, nous nous attacherons aussi à la modélisation dans un cadre de science ouverte. Notre conviction est qu’il faut comprendre et pas seulement mesurer. Et que la science doit être ouverte c’est-à-dire transparente et reproductible. L’ouverture est aussi l’ouverture aux questions de la société et aux acteurs.

La chaire sera aussi une plateforme pour former nos étudiants de l’École Urbaine aux compétences quantitatives. Comprendre et maîtriser les questions de quantification. Savoir s’opposer pour approfondir, et ce, quelle que soit leur position, est essentiel à la réussite de la transformation dont ils ont la responsabilité.

Le langage de la quantification et le langage de la modélisation seront importants pour eux. Même s’ils n’en sont pas des experts, dialoguer avec les spécialistes en parlant avec leurs mots est essentiel. La chaire sur les dynamiques urbaines proposera des outils, des ressources et du support autour de projets, pour permettre aux étudiants de s’initier.

Réutilisation

Citation

BibTeX
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Veuillez citer ce travail comme suit :
Timbeau, X. (2024, January 19). Développement organique et villes soutenables. Organic Cities, Paris. Sciences Po & Villes Vivantes. https://papers.organiccities.co/developpement-organique-et-villes-soutenables.html